« Prisonniers de dogmes qu’ils savaient périmés, de programmes qu’ils avaient renoncé à réaliser, les grands partis unissaient, fallacieusement, des hommes qui, sur les grands problèmes du moment — on le vit bien après Munich — s'étaient formé les opinions les plus opposées. Ils en séparaient d'autres, qui pensaient exactement de même. Ils ne réussissaient pas, le plus souvent, à décider de qui serait au pouvoir. Ils servaient simplement de tremplin aux habiles, qui se chassaient l'un l’autre du pinacle. »
« Le monde appartient à ceux qui aiment le neuf. C'est pourquoi, l'ayant rencontré devant lui, ce neuf, et incapable d'y parer, notre commandement n'a pas seulement subi la défaite ; pareils à ces boxeurs, alourdis par la graisse, que déconcerte le premier coup imprévu, il l'a acceptée. »« Le pis est que cette paresse de savoir entraîne, presque nécessairement, à une funeste complaisance envers soi-même. »
« J'appartiens à une génération qui a mauvaise conscience. »
« Paresseusement, lâchement, nous avons laissé faire. Nous avons craint le heurt de la foule, les sarcasmes de nos amis, l'incompréhensif mépris de nos maîtres. Nous n'avons pas osé être, sur la place publique, la voix qui crie, d'abord dans le désert, mais du moins, quel que soit le succès final, peut toujours se rendre la justice d'avoir crié sa foi. Nous avons préféré nous confiner dans la craintive quiétude de nos ateliers. »« Puissent nos cadets nous pardonner le sang qui est sur nos mains ! »
« Nous avons, pour la plupart, le droit de dire que nous fûmes de bons ouvriers. Avons-nous toujours été d'assez bons citoyens ? »
Marc BLOCH - l'étrange défaite